C’est une nuit d’août, j’ai pris la voiture avec un homme de confiance.
Il conduit.
 Il fait trop chaud.
 Il me parle.
 Il ne me tarde donc pas d’arriver.

Je regarde le ciel défiler au-dessus de nous, les nuages qui se tissent et se défont. Des stratus, bouts de cotons étirés sur fond de mer céleste. Nous passons un grand pont, un cri de joie dans mon cœur, Adieu Paris ! Adieu tristes trottoirs ! je vous quitte, je vous aime mais je vous embrasse et m’en vais être heureuse sans vous. Être heureuse sans toi. Qu’importe, je n’y pense déjà plus, je décide de ne plus penser à rien. Penser comme je le fais fini toujours par devenir nocif. Je m’accorde deux jours saints. Amen.

 

Nous arrivons sans être vraiment arrivés. On s’égare, on se gare. On cherche sans se chercher car nous nous connaissons bien. Et finalement, l’oasis et le monde.

L’hôte nous ouvre la porte d’un petit coin de paradis, à demi-nu comme un demi-ange, derrière lui des cris d’enfants sortent en courant de la bouche de jeunes adultes. Il y a du soleil et de l’eau, de la pelouse et du ciel, des sourires sur tous les visages et des tableaux sur tous les murs. Des tas de chambres, des tas de pièces, des tas de salles de bains et des mirages à chaque virage.
Des gens autour, des tas de gens, et je ne crains rien, car je suis aux côtés d’un homme de confiance. A qui il se confie, je fais confiance, et en ce sens, j’ai déjà plusieurs amis ici.
Les aiguilles des horloges ont tournées sans même que nous leur demandions. Le ciel se fonce, les alcools se lèvent. Les verres s’enchainent, les cartes tombent, on allume nos yeux en même temps que les étoiles et les corps se frôlent car les nuits sont fraîches en bord de mer.
Il est à côté de moi. Il m’a déjà vue. Il m’a déjà tourné autour. Il m’a déjà entendue lui dire non. Il avait écouté mes mots. Et ce soir je ne dis rien, je refuse juste les joints. J’effrite juste pour l’odeur au bout de mes doigts, je monte à l’étage chercher les feuilles et je m’appuie à la rampe dans les escaliers. Je souris toute seule. J’en souris d’ici. La potion magique existe les enfants. Il faut juste ne plus en être un pour pouvoir en apprécier les effets. Je ris même toute seule dans une chambre avant de redescendre au paradis. Il est à côté de moi. Son sourire est déjanté, sa voix est grave et ses gestes légers. Il est à côté de moi parmi tant d’autres. Les heures s’écoulent en secondes, les verres se vident en gorgées. Autour de moi fumées et ombres. Je perds un ami et nous le cherchons tous. Je me rappelle du sable sous mes pieds, je me rappelle la fraîcheur de la nuit, je me rappelle ses mains qui me cherchent et mon corps qui ne fuit pas. L’abandon inversé. Personne ne m’abandonne. Je m’abandonne moi-même. Je m’accorde une pause, une suspension dans l’histoire. Je garde les yeux ouverts mais je n’y vois plus grand-chose. Je ressens et je laisse faire. Je laisse aller les vagues, je laisse aller ses mains, ces regards qui transpercent, je détaille en état d’ébriété, je ne cherche plus rien. A cette heure j’ai déjà tout perdu et je ne pourrai rien retrouver. Alors, je respire. Je frôle. C’est un échange de force entre lui et moi. Ton équilibre contre ma lucidité. A trois on fait l’échange, à deux c’est plus facile, à un on s’y perd. Je n’arrive pas à effacer mon sourire, le sien est perpétuel. Nous ne parlons pas, nous nous mouvons en un langage furtif. Fuyons, rattrape-moi, où es tu, il fait nuit je ne vois rien, je connais cette vie comme ma poche ici c’est ta main. A deux doigts du délit, je m’éclipse en un sourire. Ses yeux l’attrapent, et le gardent au chaud.

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Depuis, ils ne me l’ont toujours pas rendu.