Des sourires crispés. Des faux éclats de rire assortis à leurs ongles et leurs regards aiguisés comme des couteaux à beurre.
Vous ne faites pas le poids. Mes pupilles transpercent les cœurs.
Ce monde là n’est pas le mien. Il n’appartient à personne. Puisque tout ce qu’il faut pour y être heureux se trouve dans le contenu d’une bouteille. Dans mon ventre ça cogne. J’avoue que j’ai probablement un problème. Une légère tendance à voir  l’humanité comme un tas d’insectes grouillant dans un bocal d’eau sale, se marchant les uns sur les autres pour échapper a la noyade. C’est la loi du plus fort, les filles doivent être bonnes, notre corps a un prix, et avec la crise, ce sont soldes chaque jour.
Attraper une bouteille et boire au goulot. Si je craignais pas tant les seringues je m’injecterais directement le bonheur dans les veines. Ça fait tanguer, parler fort, rire pour rien, ce qu’elles toutes font déjà toute d’une manière si faussement naturelle. Boire pour justement ne plus avoir envie de gerber, ravaler mes larmes devant tant de déception. Je pensais valoir mieux. Je pensais avoir appris la leçon.
Paris claque sous mes talons. Asphalte humide et lumières blafardes. La capitale est magnifique. Mes pensées sont foudroyantes, il fallait bien que je les stoppe ou que je les allège. Le bien être se compte en degrés, et juste à côté, ils ont dessiné une femme enceinte qui boit, rayée d’un trait. C’est interdit. Je passe ma main sur mon ventre et je ne veux pas pleurer car je ne vois pas comment un seul d’entre eux pourrait comprendre.
Je veux partir.
 
 
Les lumières défilent derrière la vitre. Rouge, vert, bleu. Je ne m’y retrouve pas. Je fais confiance car je sais que je ne suis plus fiable moi-même. C’était si facile.
 
Ici il y a du bruit, des stroboscopes qui agressent mes yeux et cachent la laideur des visages.
Je ne pense pas à toi. Savais-tu que l’amour a sur le cerveau le même effet que l’alcool ou la drogue ? C’est prouvé scientifiquement.
Et puis, tu sais, ça ne compte pas. Rien ne compte ici, et je me demande seulement si je suis la seule à le savoir. Si justement, ils ne prennent pas ce monde là pour la réalité. Tout est fiction et quand il se colle contre moi, je ne regarde même pas son visage. Mes yeux pourraient l’exterminer et ça ne ferait pas propre. Mon esprit est ailleurs, bouger, j’ai ça dans le sang. Je suis sur pilote automatique à des années lumières de ses mains sur mes hanches, son souffle sur ma nuque, ses yeux qui cherchent un sourire ou un prénom. Le sien, je m’en tape.
Je ne pense pas à toi.
 
Je rentre chez moi en sécurité dans une bulle de cuir. J’ai vieillis de dix ans et je ferais presque un peu plus que mon âge. Il est quatre heures du matin. J’ai sur la peau l’odeur d’un homme que je ne connais pas. Je balance mes fringues par terre. Le miroir ne me dit rien. Mon corps lui n’a pas vieillis. Tout est si lisse, les cicatrices ne paraissent pas sur l’épiderme. Ton cœur qui battait dans mon ventre, je ne le sens plus.
Je claque des dents en position fœtale et je m’endors le ventre vide.
Demain n’existe plus.
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